jeudi 31 janvier 2013

427 communautés célèbrent l’abandon de l’excision et des mariages précoces/forcés lors de la première déclaration publique régionale du Sénégal


Le dimanche 20 janvier 2013 débute par une matinée chaude et poussiéreuse. Ziguinchor, la principale ville de Casamance, au sud du Sénégal, s’apprête à accueillir un grand événement.


Une marche pacifique des communautés vers le lieu du rassemblement à Ziguinchor

Des rangées de chaises, une estrade pour les officiels, une tribune pour les discours, des banderoles et des tests sonores : tout est prêt pour que 427 communautés déclarent l’abandon de l’excision et des mariages précoces et forcés. Aujourd’hui, le Sénégal célèbre la première déclaration publique régionale de son histoire. Préparée depuis plusieurs mois, elle est le résultat d’activités de sensibilisation et de mobilisation sociale sur les droits humains et sur le contenu sur Programme de Renforcement des Capacités Communautaires (PRCC) de Tostan. Ces discussions ont été menées dans les villages recevant le programme de Tostan et auprès des communautés voisines par les participants du programme.

Depuis avril 2001, quand Tostan a débuté ses activités en Casamance, les villages d’Oulampane, de Sindian, Diégoune, Goudoump ou encore Niaguis avaient déjà accueilli de telles déclarations. Toutes ont joué un rôle crucial pour aboutir à la déclaration publique régionale et pour soutenir les efforts du Plan national du gouvernement pour un abandon total de l’excision au Sénégal d’ici 2015.

Cette première déclaration publique régionale du pays a été organisée par Tostan Sénégal, en collaboration avec les communautés et les autorités locales, telles que le Gouverneur, les préfets et sous-préfets de la région, le maire de la commune, les présidents des conseils régionaux et les chefs de villages ainsi que les organisations de base travaillant avec les femmes et les jeunes. La déclaration a également été rendue possible par le soutien de la Communidad de Madrid, Johsnon & Johnson, Orchid Project, l’Unicef et le FNUAP.

Après plusieurs mois de rencontres entre les villages et de caravanes de sensibilisation, le jour de la déclaration s’est ouvert sur une marche pacifique des communautés vers le lieu du rassemblement. Femmes, hommes et enfants ont marché et dansé dans les rues de Ziguinchor au rythme des musiques sénégalaises. Danses et chants ont été encore plus intenses à l’arrivée sur le lieu de la déclaration. Les communautés ont été suivies de la délégation du gouvernement, qui a fait le tour de la place, accompagnée de Tostan Sénégal, Tostan International, Tostan Gambie et toutes les régions impliquées dans la déclaration.

Après la bénédiction de l’Imam aux participants, le représentant du Conseil Régional, Wandy Diem, a souligné l’importance d’un tel jour et a rappelé à quel point une déclaration régionale était cruciale pour parvenir à l’abandon total de l’excision au Sénégal d’ici 2015.

Les jeunes d’une troupe de théâtre, parés de costumes vert brillant, ont joué un sketch sur l’excision et les mariages précoces et forcés. Pendant qu’ils déclament leur texte en wolof, en diola et en français, le public reste silencieux. La place n’a jamais été aussi calme depuis le matin. Le sketch rappelle qu’un enfant de 13 ans ne devrait pas être marié et que l’excision n’a pas de lien avec la religion. La pièce se termine par un « adieu » à l’excision.



Les jeunes d’une troupe de théâtre déclare un « adieu » à l’excision

Ont suivi des discours du chef de la communauté de développement de Ziguinchor, Pape Diallo et de l’équipe de mobilisation sociale, qui ont fait partie intégrante de l’éducation et de la sensibilisation aux droits humains des communautés. Tous ont attiré l’attention sur l’importance de l’éducation des filles.

Après des danses et des sketchs inspirés des traditions locales, le moment de la déclaration pour l’abandon de l’excision et des mariages précoces/forcés est enfin arrivé. Elle est lue en langues wolof, diola, mandingue et français au nom de 427 communautés.

« C’est un grand jour pour le renforcement des droits humains au Sénégal. Nous devons nous appuyer sur le côté positif de notre culture. Tout le monde devrait travailler ensemble pour faire du Sénégal un endroit meilleur : les jeunes, les communautés les imams, les médias, les partenaires, tout le monde », a déclaré Khalidou Sy, coordinateur national de Tostan au Sénégal. Il a remercié toutes les communautés impliquées et les a félicitées, ainsi que les autorités régionales pour leur engagement en faveur de l’abandon de l’excision et du mariage précoce/forcé dans la région.

L'un des nombreux spectacles culturels tout au long de la journeé

L’Unicef, représenté par Jean Lieby, responsable de l’unité Protection de l’enfance à l’Unicef Sénégal, a remercié le Gouvernement du Sénégal pour son engagement et son soutien aux communautés et au changement social. « Tostan travaille avec l’Unicef, le Gouvernement du Sénégal et beaucoup d’autres organisations pour promouvoir un changement social durable. Ils mènent un travail considérable et capital, ce n’est pas une tâche facile et nous les en remercions. Nous sommes fiers de travailler avec Tostan à tous les échelons : avec les membres des communautés, les villages et les autorités locales ».

La journée s’est achevée par un discours enflammé du Gouverneur de la région de Ziguinchor qui a déclaré : « Aujourd’hui, nous avons la chance d’être les témoins d’un jour historique. Une telle décision est vitale pour les générations futures et pose les bases de nouveaux comportements pour protéger l’intégrité physique et morale des enfants et des femmes. Les autorités administratives et religieuses ainsi que les médias doivent travailler de concert pour suivre ce qui s’est passé aujourd’hui. Je remercie aussi la délégation venue de Gambie ; nous avons besoin d’une approche globale et transfrontalière pour mettre fin à l’excision et au mariage précoce et forcé ».





jeudi 17 janvier 2013

Guinée : l’éducation au cœur du développement

Un récit de Julie Dubois, volontaire à Tostan Guin

Le nom de Simbaya est désormais synonyme de dynamisme. Partout en Basse-Guinée, l’exemple de Simbaya est donné aux autres communautés pour montrer que les Comités de Gestion Communautaire (CGC) ne doivent pas manquer d’ambition.

Depuis 2009, date du début du programme de Tostan  dans la communauté, beaucoup de choses ont changé à Simbaya. Tout d’abord, en 2009, le village est devenu un quartier à part entière de la commune urbaine de Dubréka (préfecture).  Ensuite de nombreux petits travaux ont été effectués : ponts réparés, électrification du village, construction d’un siège de quartier, etc.

Mais ce qui nous amène aujourd’hui à visiter le quartier de Simbaya, c’est la construction d’un Centre d’Encadrement Communautaire (CEC).


L’aventure a commencé en 2009, au début du Programme de Renforcement des Capacités Communautaires (PRCC) de Tostan. Les adultes prennent conscience de l’importance de l’éducation et l’afflux d’enfants lors des classes du PRCC poussent le Comité de Gestion Communautaire à réfléchir à une solution pour ces enfants qui ont soif de savoir.

L’école la plus proche est située de l’autre côté de la nationale, une des routes les plus dangereuses de la Guinée à cause des nombreux camions chargés de sable qui roulent à vive allure vers les cimenteries de Conakry. Cette école, en plus d’être difficile d’accès pour des enfants en bas âge, est très fréquentée et la place manque pour accueillir tous les enfants du secteur : les cours n’ont lieu que par demi-journée afin d’avoir deux classes par niveau.

Pour faire face à ces difficultés, le CGC de Simbaya a choisi lui-même de mettre en place un Centre d’Encadrement Communautaire  afin de prendre en charge tous les enfants du quartier.
Le CEC a commencé avec une cinquantaine d’enfants, dans deux chambres d’une maison mise à sa disposition par un notable du village.

Grâce au dynamisme du CGC et du facilitateur, le quartier de Simbaya a pu bénéficier de financements qataris qui ont permis de construire un bâtiment avec 6 salles pour accueillir le CEC, une mosquée, un forage avec une pompe à eau et un projet de centre de santé est en cours.

Grâce aux campagnes de sensibilisation du CGC, il y a aujourd’hui 180 enfants qui vont au CEC, dont plus de la moitié sont des filles (92). Ces enfants, âgés de 4 à 12 ans sont répartis en 3 classes selon le niveau. L’emploi du temps scolaire est réparti entre les cours d’arabe et les cours de français. Le CGC a fait le choix de ne fixer aucun frais de scolarité afin de sensibiliser le plus de parents possible à l’importance de l’éducation pour les enfants. Les parents doivent juste prendre en charge les fournitures scolaires. 


Maintenant que l’objectif de scolariser tous les enfants de Simbaya semble atteint, le CGC envisage de demander une faible cotisation aux parents afin de pouvoir faire face aux frais de fonctionnement et de pérenniser le CEC.

En effet, tous les enseignants sont bénévoles et peu ont suivi une véritable formation sur l’enseignement. Même si le CGC, à travers le fonds d’appui au développement mis à sa disposition par Tostan, aide ponctuellement les enseignants, le manque de moyens se fait cruellement ressentir : le CEC ne dispose pas du matériel essentiel à son fonctionnement : tables pour les enfants, livres, etc.

Néanmoins, le dynamisme de la communauté permet d’envisager un avenir durable pour ce CEC : partis d’une situation où la plupart des enfants de Simbaya n’allaient pas à l’école, il y a, après 3 ans de fonctionnement, 180 enfants scolarisés avec un niveau qui progresse de mois en mois.

Le CEC constitue la porte d’entrée du développement de la petite enfance en Guinée. Il contribue à accroitre le taux brut de scolarisation et à éliminer progressivement le taux d’analphabétisme et de pauvreté des femmes rurales.

C’est une structure d’accueil en milieu rural et péri urbain, pourvue d’un équipement minimum pour recevoir dans de bonnes conditions sanitaires, nutritionnelles et d’éveil des enfants en bas âge.


 
Blog personnalisé par Salim Dramé