Sur la place
centrale de Rufisque, au Sénégal, l'une des plus grandes villes du pays, une
marée humaine vêtue de vêtements fabriqués de tissus bruns est rassemblée à
l'extérieur de la maison d'arrêt et de correction pour femmes pour célébrer le
8 mars, la Journée internationale des droits des femmes. Les couleurs
assorties, portées par les détenus et les visiteurs, mettent en évidence le
sentiment de solidarité et soulignent que nous sommes tous égaux et dignes des
mêmes droits humains.
Quarante-deux des
femmes détenues dans l'établissement participent au programme de Tostan mis en
place dans l’enceinte de la prison. Depuis 2003, Tostan a mené au Sénégal une
version adaptée de son Programme de renforcement des capacités communautaires (PRCC) auprès de
détenus hommes et femmes. Le projet est maintenant mis en oeuvre dans cinq
prisons et vise à préparer les détenus à réintégrer la société à leur
libération. A travers le PRCC, les participants prennent part à des discussions
dans leur langue animées par un facilitateur de Tostan. A cette occasion, ils
apprennent, échangent et débattent sur les droits humains, la santé, l'hygiène,
l'alphabétisation fonctionnelle, le calcul et la gestion de projet. Lors de la
célébration de la Journée internationale des droits des femmes, les membres du Comité de Gestion Communautaire (GCC) ont présenté un sketch mettant en
scène l'arrestation d'une femme, les premiers obstacles auxquelles elle a dû
faire face en prison, comment le programme de réintégration lui a permis
d'appréhender de nouvelles idées et compétences, et comment elle a pu se
réconcilier avec sa famille après avoir été libérée.
Lors de
l’événement, une table était installée avec un empilement de produits colorés
rendant hommage aux compétences acquises par les femmes du projet. Les
détenues apprennent à faire des jus de fruits, à broder, et le processus de
traitement des graines céréalières locales au cours de séances de formation
dispensées par des formateurs, souvent d'anciennes détenues. Ces
compétences permettent à beaucoup de femmes de prendre confiance dans le fait
qu'elles seront en mesure de subvenir à leurs besoins financiers, une fois
libérées. Les biens produits par les participantes en prison sont vendus
localement aux membres de la communauté. Les fonds ainsi collectés sont
utilisés pour acheter du matériel et pour financer un fonds de soutien social
pour le traitement éventuel de détenues malades. Des fonds sont également
répartis entre les participantes, les aidant à économiser lors de leur séjour
en prison.
Mariama Ndiaye (nom
changé), l'une des détenues qui participe au projet, a prononcé un discours
devant la foule réunie pour l’événement. Elle dit avoir apprécié la solidarité
manifestée lors de cette célébration en faveur des droits des femmes et des
enfants et que le rassemblement a permis aux détenues de sentir qu'elles
n'étaient pas victimes de discrimination en raison de leur statut. Plus tard,
Seynabou Ndiaye, un membre de l'administration de l'établissement, a fait écho
à ce ressenti en expliquant : "entre nous et les détenues, c'est comme une
famille.".
Alors que la
cérémonie prend fin, une femme vendant des légumes à proximité de la place
s'approche de la foule et place de la laitue sur la pile de cadeaux destinés
aux détenues : "Pour vous, mes sœurs !" Dit-elle en souriant et
faisant signe à ces femmes.
*Photos de Shona Mcloed, Tostan
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